Article du Télégramme (3 juillet 2014) - Vues à 360º. L'alternative brestoise à Google
Avec quelques mini-caméras et beaucoup de bidouille, quatre jeunes Brestois se sont lancé le défi de proposer une alternative Open source à Google street view. Pari gagné. Grâce à leur drôle de sac à dos, ils parviennent à créer des panoramas dignes de ceux du géant américain.
« On cherchait à développer un projet qui n'existait pas encore en logiciel libre », se souvient Benjamin Bernard, 20 ans, étudiant en informatique à l'Insa de Rennes. C'était il y a un an. Avec ses trois équipiers, tous la vingtaine, il se penche sur le cas de Google street view, le fameux site américain qui permet de visualiser des panoramas à 360° de lieux situés aux abords de voies urbaines ou rurales.
Un prototype pour seulement 4.000 €« On a contacté un étudiant américain qui avait tenté la même chose. Mais le résultat qu'il avait obtenu n'était pas probant », poursuit Benjamin Bernard. Qu'importe. Avec Mickaël Derrien et Hervé Sousset, étudiants à l'Enib de Brest, ils commencent à chercher des endroits qui n'auraient pas encore été couverts par les voitures de Google. Ils se tournent alors vers des associations locales de conservation du patrimoine.
Bingo. Celle qui gère le fort de Bertheaume, à Plougonvelin (29), est intéressée. Tout comme le Conservatoire botanique de Brest, l'association Guipavas identité patrimoine ou encore les Amis de la Pointe Saint-Mathieu. L'équipe reçoit également le soutien de la ville de Brest et de la mairie de Lanhouarneau (29). Avec 4.000 € en poche, ils achètent six mini-caméras, qu'ils démontent et relient entre elles pour créer un boîtier capable de prendre des images à 360°.
Un harnais de taille-haie servira de base à leur drôle de sac à dos, duquel sort un petit mât qui supporte leur boîtier. Pour l'électronique, c'est Arnaud Reungoat qui s'y colle, dans les locaux du Fablab de la Maison du Libre, à Brest. « Pour gagner de la place, on a réduit au maximum la taille du circuit imprimé qui permet de synchroniser les caméras : il a fallu souder à la loupe », sourit Benjamin Bernard. L'ensemble est piloté par un micro-ordinateur.
Collaborations internationales Une fois la partie matérielle au point, l'équipe de bidouilleurs a utilisé des morceaux de logiciels libres pour réussir à assembler les différentes prises de vue et créer des panoramas visibles sur le net. Résultat : en seulement sept minutes, leur logiciel est capable d'assembler les clichés nécessaires pour créer des visuels dignes de ceux du géant américain.
« On a travaillé en collaboration avec un étudiant anglais qui bossait sur le même type de visionneuse. On a apporté nos modifications et on lui a renvoyé le tout : ça permet à tout le monde d'avancer et de gagner du temps ». L'algorithme de floutage des visages et des plaques d'immatriculation leur sera fourni par un étudiant canadien.
Un esprit « libre », qui se développe actuellement de façon exponentielle avec l'arrivée massive de logiciels Open source, ces programmes gratuits que chaque utilisateur peut modifier à loisir. « On fait tout cela de façon entièrement bénévole », précise Benjamin Bernard. Altruiste ? « On peut dire ça, en effet, mais c'est surtout l'aspect défi qui nous intéresse : montrer qu'on peut offrir une alternative à des logiciels tels que Google street view, rapidement et avec un budget très réduit. Nos partenaires se sont, par ailleurs, engagés à publier leurs contenus sous licence Creative Commons ».
« Aller au-delà de l'image »« Avec cette technologie, on peut envisager de réaliser les prises de vue en voiture mais nous visons, avant tout, les lieux qui ne sont pas accessibles aux véhicules », explique le Brestois. « À l'usage, on s'est d'ailleurs rendu compte que ce dispositif pouvait permettre aux personnes à mobilité réduite de découvrir virtuellement des paysages qui leur étaient jusqu'alors inaccessibles. On souhaite aussi aller au-delà de l'image, en proposant des contenus interactifs à l'intérieur du panorama : vidéos, textes, etc. ».
Récompensé par des experts Le projet Open path view a d'ores et déjà tapé dans l'oeil des experts. En avril, il a ainsi été primé lors du festival DécryptaGéo, le rendez-vous des professionnels de l'information géographique. Le projet vient, par ailleurs, de recevoir un prix des mains de Jay Melican, d'Intel Labs, lors de la Maker Faire de Paris, véritable Mecque pour les fanas de « Do it yourself ».
« Nous sommes en train de peaufiner la partie web mais l'ensemble est opérationnel. Je ne pense pas qu'on pourra se permettre de continuer à faire ça gratuitement bien longtemps, ne serait-ce que pour payer nos frais de route et l'entretien du matériel. Pour l'instant, on honore nos partenariats mais on cherche aussi de nouveaux lieux à photographier : les associations intéressées peuvent d'ores et déjà nous contacter ». À bon entendeur.
Site web du projet :
http://opv.liSource le Télégramme (3 juillet 2014)
http://www.letelegramme.fr/bretagne/vues-a-360-l-alternative-brestoise-a-google-03-07-2014-10240909.php